Serguei JIRNOV, politologue, réfugié politique, ancien élève de l'ENA

UNE RENCONTRE EMBARRASSANTE A L'ÉLYSÉE

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Le 1er juin 2012 au soir M. François Hollande a reçu à l’Élysée M. Vladimir Poutine. Apparemment, sur la forme, les deux hommes ont le même statut des chefs de leurs états respectifs. Mais en réalité un énorme fossé les sépare. Pour résumé et schématiser en utilisant les comparaisons qui parlent aux français: Poutine est Sarkozy, Berlusconi ou Georges Bush (Jr.), mais en cent, mille fois pire. Le soir du 1er juin le président légitime de la République française, plébiscité le 6 Mai dernier par le peuple souverain et libre de France, a reçu un individu douteux et illégitime qui, au moins depuis 2008 pour ne pas dire depuis 1999, bafoue d’une manière arrogante, provocatrice et systématique tous les principes de la démocratie européenne, d’un État civilisé, à l'intérieur et à l'extérieur de Russie.

Pour se maintenir au pouvoir réel dans son pays, M. Poutine avait mis sur son trône en 2008 une pure et simple marionnette - le jeune Medvédev, ce qui a eu pour conséquence la déligimitisation complète de la fonction du chef de l’État et la dévalorisation totale de la présidence de Russie comme institution étatique.

Les occidentaux pourraient tomber de leurs chaises s’ils apprenaient que M. Poutine, de son retour de la RDA, exerçant en 1990-1991 au sein de l’Université de Léningrad les fonctions d’un officier de la police politique secrète soviétique, sous la couverture officielle d’un fonctionnaire administratif universitaire, avait recruté comme indicateur secret du KGB le même M. Medvédev, à l’époque – professeur associé à la faculté de droit. Et cet ancien indic plus que probable de la police politique secrète a suivi depuis 1990 partout dans la vie civile son ancien officier traitant du KGB en exécutant scrupuleusement ses ordres, y compris lors de la mandature suprême à la tête de l'État russe.

Les seules vraies raisons évidentes de l’intérim de M. Medvédev à la présidence du Russie, à part celle non discutable de garder la place chaude pour M. Poutine devenu pour un temps et uniquement pour la forme Premier ministre, était l’exécution de l’agression contre l’État souverain de la Géorgie (préalablement mise ne place par Poutine depuis longtemps par les mouvements anticipés des troupes russes), et la prolongation inconstitutionnelle du mandat présidentiel de quatre à six ans pour M. Poutine qui avait prévu de revenir aux commandes en 2012, mais ne voulait pas se salir les mains par cette tâche ingrate et manifestement illégitime.

Lorsque le 24 septembre 2011, lors du congrès du soit disant «parti du pouvoir» («Russie Unie»), Poutine et Medvédev ont mis la Russie entière devant le fait accompli du retour inconditionnel et illégitime de Poutine au Kremlin et de leur nouvel échange des fonctions respectives du Président et du Premier ministre, comme s’ils échangeaient de vulgaires casquettes, cela a choqué tout le monde même dans leur propre camp.

Poutine et Medvédev ont fait par la suite truquer les élections législatives du 4 décembre 2011, en faisant éliminer toutes les oppositions russes de la participation à la campagne et en falsifiant le scrutin. De nombreuses preuves irréfutables existent, mais les tribunaux russes, sous la mainmise totale du pouvoir exécutif en place depuis 1999, et la très servile commission centrale électorale ont refusé, sans aucun motif légal, toute reconsidération des résultats falsifiés. Ce qui a doté la Russie d’un parlement illégitime en décembre 2011.

Ces falsifications ont eu pour conséquence la mobilisation populaire inouïe et sans précédent sous le régime de Poutine. Dans le froid glacial hivernal et à plusieurs reprises des centaines de milliers de personnes ont spontanément et pacifiquement manifesté leur rejet de la personne de M. Poutine et de ses méthodes autocratiques. Compte tenu des vrais risques pour les carrières professionnelles et même pour la vie des gens en Russie de Poutine, ces centaines de milliers de citoyens concernés russes valaient largement les millions d'européens qui manifestent habituellement en toute tranquillité en Occident démocratique.

Malgré la réprobation massive des représentants du peuple russe, M. Poutine a fait écarter de nombreux candidats de la participation aux élections présidentielles du Mars 2012. Le très populaire M. Alexis Navalny a été illégalement emprisonné en décembre 2011, jusqu'à la fin de la période de la déposition des candidatures. M.M. Limonov et Ivachov, entre autres, ont vu leurs candidatures refusées arbitrairement. Enfin la fameuse commission centrale électorale russe a rejeté en Janvier 2012 la candidature du très respecté M. Yavlinsky prétextant les prétendues irrégularités des signatures recueillies en sa faveur, même s’il en disposait de 2 millions nécessaires et correctes. On connaît le résultat. La Russie a reçu le même président illégitime, quasiment pour la quatrième fois (car la présidence intérimaire factice de la marionnette Medvédev a été une pure manipulation). Mais cette fois-ci Poutine veut rester six ans.

Le comble de cynisme: après la falsification des élections législatives de décembre 2011 en faveur du parti de Poutine et des élections présidentielles du Mars 2012 en faveur de Poutine en personne, le pouvoir en place a décoré le controversé président de la commission centrale électorale d’un ordre officiel russe. L’anecdote: le régime a été obligé de le faire secrètement, l’oukase de Medvédev portant la décoration de M. Tschurov n’a jamais été rendu public.

Le 6 Mai 2012, jour du deuxième tour des élections présidentielles en France, pendant le vote démocratique et libre des français, la police de Poutine a sciemment organisé un piège pas très loin de Kremlin. Plusieurs dizaines de milliers de manifestants pacifiques (entre 50 et 80 mille, selon les organisateurs) ont été amenés dans ce traquenard pour y être matraqués, battus et arrêtés par centaines.

Le 7 Mai 2012, jour de l’investiture du président illégitime russe, le centre de Moscou (qui correspond à la ville de Paris intra-muros) a été interdit à la circulation et vidé de ses passants comme pendant les raids aériens des hitlériens durant la Deuxième guerre mondiale. Les opposants au régime poutiniste, sans armes ni pancartes, se faisaient arrêter et violenter dans les endroits publics tels des restaurants et cafés moscovites.

Prétextant maladroitement un prétendu surmenage dans la composition de son nouveau gouvernement, Poutine a scandaleusement refusé à la dernière minute de se rendre au dernier sommet du G8 aux États Unis. Ce qui a créé un énorme embarras international diplomatique car ce sommet avait été spécialement emménagé pour ne pas froncer les susceptibilités du tyran russe. Initialement la rencontre du G8 avait été prévue au Chicago, la veille du sommet de l’OTAN. Mais connaissant l’aversion maniaque de Poutine pour l’Alliance atlantique, le G8 a été commodément transféré au Camp David, à la résidence campagnarde des présidents américains.

Mais Poutine, tel un enfant gâté et tyrannique, a décidé de bouder les sept chefs d’états et de gouvernements les plus puissant du monde. L'ancien officier du KGB a encore préféré envoyer aux USA sa doublure, son ex-indic, sa marionnette, le premier ministre sans gouvernement. Car Poutine savait très bien ce qui l’attendait aux USA – la réprobation de ses méthodes antidémocratiques à l’intérieur de la Russie et de son soutien inconditionnel au tyran sanglant syrien Bachar al Assad qui noie impitoyablement son peuple dans le sang depuis plus d'un an, en bombardant ses villes et villages avec les armes lourdes de fabrication russe, toujours vendues à la Syrie par Poutine qui refuse un embargo international militaire et s'oppose à toute sanction efficace par l'ONU, utilisant à tort son droit de veto au Conseil de sécurité.

Fin Mai 2012 Poutine, le président illégitime, après avoir fait voté par la Douma, la chambre basse (très basse!) du parlement contesté russe, une nouvelle loi scandaleuse qui a élevé les amendes contre les manifestations populaires légitimes à 500 fois le salaire minimum légal russe, s’est enfin décidé de sortir des murs de Kremlin virtuellement assiégés par le peuple russe.

Mais avant d’aller en France pour y rencontrer le nouveau président légitime et démocratiquement élu, Poutine a fait une nouvelle démarche provocatrice et arrogante. En chemin il s’est arrêté à Minsk, chez le dictateur biélorusse Alexandre Loukachenko qui depuis des années est sous le feu diplomatique des institutions européennes et des ONG internationales à cause des violations des droits de l’homme dans son pays. N’oublions pas que la Russie poutiniste a annexé 20% du territoire géorgien et entretient les relations privilégiées avec le régime dictatorial nord-coréen. Le président illégitime de Russie Vladimir Poutine ayant clairement choisi le camp des tyrans et dictateurs, continue à défier ouvertement le monde entier, démocratique et civilisé.

N’oublions pas, non plus, qu’un tel personnage controversé et indigne a été scandaleusement élevé à la plus haute dignité de la Légion d’Honneur française – Gran’Croix par un président irresponsable pour ne pas dire criminel Jacques Chirac! Ce qui a déshonoré et cette institution honorable, et la République française, et Chirac en personne. Le jour de son investiture François Hollande a été élevé au même rang que portait Poutine l'Infâme depuis plusieurs années. En tant que le nouveau Grand Maître de l'Ordre national de la Légion d'Honneur, le président actuel hérite de cette situation embarrassante dans laquelle avait mis la République française la droite "républicaine" de Chirac qui a été décoré, en retour, par Poutine de la plus haute décoration russe.

Tel est le personnage qui a été l’hôte du nouveau président français François Hollande le 1er Juin 2012. La Grande Russie en a honte et en a assez de Poutine. Il faudrait que les démocraties occidentales apprennent enfin à lui reprocher autres chose que son soutien aux dictateurs extérieurs car lui même, il en est un dans son propre pays dont le peuple souverain réclame le départ immédiat et inconditionnel, tout comme le peuple syrien le fait pour Assad.


La tension entre les deux hommes était palpable


Rencontre à Minsk entre deux dictateurs frères


Manifestation antipoutine à Trocadéro organisé par Amnesty International

 
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